Voyages et Découvertes

Voyage à Moanda (3)

En route, l’aspect de Moanda me désole. Ca ressemble plus à un village de pêcheurs qu’à une ville. Partout, il y a des maisons en construction, mais aucun bâtiment vraiment imposant, et surtout presque pas de route asphaltée…
Nous nous rendons à Nsiamfumu, un village à quelques kilomètres de la ville. Nous y sommes en une dizaine de minutes. Un instructeur nous accueille, et nous explique que nous allons assister à un briefing, puis à un exercice militaire que l’on appelle opération civilo-militaire. Le principe est que les militaires doivent circuler dans la population, parler avec les gens, les écouter, les mettre en confiance et restaurer la confiance donc des gens en eux. Après le briefing, nous nous joignons à l’une des équipes. Je sais déjà qu’ils n’auront pas la tâche facile. A certains endroits, l’accueil est normal, comme devant une boutique, des jeunes gens saluent les militaires. On lit un peu de crainte dans leurs yeux, mais ils répondent à leurs questions, puis se détendent peu à peu et parlent de certains de leurs problèmes. Avec un air de satisfaction, les militaires poursuivent leur chemin. Jusqu’à ce qu’une voix les interpelle de loin. Un monsieur, la soixantaine, machette à la main, les menace et leur fait signe de ne pas approcher. Nous approchons quand même. Il a été victime plusieurs fois d’hommes en uniforme et ne veut pas avoir affaire à eux à nouveau. Il leur parle en lingala ”Partez d’ici, ce terrain m’appartient, laissez-moi tranquille, vous êtes toujours là à créer des ennuis, non, partez !”

Désarçonnés, les militaires tentent de calmer notre homme, qui ne veut rien entendre. Ils lui expliquent qu’ils viennent en amis, et qu’ils n’ont pas l’intention de lui arracher sa maison, ou quoi que ce soit, mais qu’ils veulent juste savoir quelles sont les difficultés que lui et sa famille rencontrent au quotidien. Le monsieur se calme et baisse sa machette, il est perplexe, hésite un moment puis leur explique que le village fait parfois l’objet l’attaque d’hommes en uniforme et qu’il ne sait plus à qui se fier. Il ajoute que ses enfants ne peuvent plus aller à l’école parce qu’il n’a pas les moyens de les y envoyer. Une ribambelle d’enfants nous entoure justement. Les militaires leurs offrent des bonbons. Tout est bien qui finit bien, notre hôte remercie les militaires, qui le remercient aussi et le quittent avec des mots d’encouragements.

Plus loin, des rues désertes, mais nous sentons des regards sur nous. Apeurés, certains se sont cloitrés chez eux. Ils regardent à travers leurs fenêtres, et lorsque les militaires leur demandent ce qu’ils font enfermés, ils répondent qu’ils ne sont pas enfermés, qu’ils préfèrent rester chez eux. Nous sourions, puis poursuivons notre route. Plus loin, nous croisons deux jeunes femmes. Elles nous racontent que des hommes armés ont violé 4 jeunes femmes il y a quelques jours. L’une des femmes violées est l’une des jeunes femmes qui nous parlent. Elle baisse les yeux, et ose à peine parler. C’est sa compagne qui relate les faits. Je suis triste tout d’un coup. Etre confronté à la bestialité des hommes et y être impuissant est la pire sensation qui soit. Les militaires rassurent les deux jeunes femmes du mieux qu’ils peuvent, puis c’est la fin de l’exercice, il faut rentrer au lieu du rassemblement. C’est à moi de jouer, je dois interviewer les militaires, je leur pose des questions sur ce qu’ils ont retenu de cet exercice, sur la pratique qu’ils auront de ce genre de manière d’interagir avec la population dans l’avenir. Ils semblent bien optimistes.

L’exercice est terminé. Retour à l’hôtel, j’ai l’après-midi de libre, et je choisis de faire un tour à la plage, le temps de me reposer et de me rafraichir un peu. Dans l’après-midi, j’attends des journalistes venus de Matadi : Guy-Roger, Hyppolite et Jeancy, et un de Kinshasa, Luc-Roger.


La plage à Moanda La plage à Moanda

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