Frontières
Cette fois-ci c’est la frontière vers Brazzaville que je traverse. Un week-end de l’autre côté du fleuve. Nous sommes en groupe, donc pour moi pour qui la traversée est un mystère, c’est plutôt rassurant.
Pour ceux qui se demandent comment procéder, c’est simple. Du moins en apparence. Il faut se rendre au bureau de la Direction Générale des Migrations (DGM) pour acheter un laissez-passer, qui coute 29.500 francs congolais (un peu plus de 20$). Puis, direction le “beach” (c’est comme ça qu’on appelle le port d’embarquement et de débarquement vers Brazzaville chez nous) , à partir duquel on est censé attendre tranquillement de prendre un canot rapide. Mais premier hic, je n’ai pas ma carte d’électeur, qui fait office de carte d’identité, et j’utilise donc mon passeport. Dessus, il est marqué que je suis « employée », et les agents des migrations se font un malin plaisir de me demander un « ordre de mission ». J’ai beau leur expliquer que nous sommes un week-end, que je vais en week-end donc et pas en mission, ils ne veulent rien entendre. On sait bien où tout cela mène, à payer un petit surplus pour ne pas être inquiété. La dame du guichet nous assigne un accompagnateur, censé nous faciliter les choses pour que je ne sois plus inquiétée au beach. Arrivés sur place, il nous demande d’attendre quelques minutes, ce que nous faisons. En fait c’est presqu’une heure que nous attendons. Il revient, et semble ne pas avoir résolu le problème, parce qu’il nous demande de chercher un ordinateur pour faire taper un « ordre de mission » et passer sans problème. Ma patience commence à atteindre sa limite. Il s’en rend compte et nous fait entrer dans l’enceinte du fameux beach. Petit à petit, nous comprenons que nous sommes victimes d’une arnaque. Nous avons payé de l’argent à ce bonhomme incapable de résoudre le problème, et qui nous abandonne dès que nous entrons dans la salle de « fouille », ou au lieu de nous faire fouiller, nous payons 2000 francs et déclarons ce que nous avons dans nos bagages.
De tension en tension
Nous allons nous asseoir à l’extérieur de la « salle d’attente », attendant que nos noms soient appelés pour que l’on nous donne nos billets. Il se passe plus d’une heure, et enfin nos noms sont appelés. Nous allons donc bientôt embarquer. Notre « accompagnateur » nous regarde de l’autre côté de la grille qui constitue un couloir qui mène jusqu’à l’embarcation. Il disparait, et nous sommes face à des agents de la DGM qui une fois de plus, demandent le fameux ordre de mission. Je leur explique une fois de plus que je ne vais pas en mission et ils me disent de me mettre sur le côté sans m’écouter. A bout de patience, je demande qu’on me rende mon passeport pour que je rentre chez moi. L’un de mes compagnons de voyage essaie de calmer la situation pendant que les autres voyageurs embarquent, et il y arrive apparemment, je suppose à coup de pourboire. Moi je suis épuisée et ne dis plus un mot. Nous embarquons en silence, l’on nous tend des gilets de sauvetage que nous enfilons, et je commence à me détendre, mais je ressasse tout l’avant-midi dans ma tête, me demandant comment autant de désordre peut régner à un endroit pareil. En plus il fait chaud, ce qui n’aide pas à calmer les voyageurs et les agents qui travaillent ici. En plus, cet endroit n’a rien d’accueillant : tout est vieux et sale, il n’y a pas d’ordinateurs, comme si on était au siècle passé.
Une dizaine de minutes plus tard, nous sommes arrivés au beach de Brazzaville, là les choses sont plus civilisées. Nous payons quelques taxes, nous faisons enregistrer, et une vingtaine de minutes plus tard, nous sommes à Brazzaville. Moi qui n’y croyais plus…
Le retour
Le week-end a été reposant, à flâner un peu et faire quelques recontres, mais ce lundi il faut déjà rentrer. Nous nous dirigeons donc vers le beach, et cette fois encore nous avons un « accompagnateur » ou je dirais « facilitateur » , et tout est différent: il nous demande de nous installer sur un banc, ce que nous faisons en discutant tranquillement, pendant qu’il nous enregistre pour le canot qui part ce matin. Moins de 30 minutes plus tard, nous avons nos billets, et nous alignons pour embarquer. Il faut encore payer pour la fouille ici (sans nous faire fouiller bien sûr), pareil à Kinshasa. La traversée se passe dans la gaité, nous sommes un groupe de jeunes qui se connaissent, et à l’arrivée à Kinshasa, devinez quoi, les tracasseries recommencent…Je n’ai même pas envie de vous raconter la suite…
2 Comments
El Chapo
Pour nous tes lecteurs, nous attendons la suite du drame à ton retour à Kinshasa.
Herve-greg Kabonte
Dommage pour toi Larissa. J'ai fait ce voyage des dizaines de fois, de mon expérience, ça a toujours été plus difficile à Brazzaville qu'à Kinshasa.
Je suis surpris de voir que le laisser-passer aie quadruplé de prix ( mais c'est déjà une bonne chose qu'on y revienne).
Au fait, tu devrais éviter toute sorte de facilitateur pour ce parcours, voyager avec une carte d'électeur est de loin plus facile qu'un passeport, c'est un MUST. Donc avec une carte d'électeur, tu vas acheter ton laisser-passer près de GG Mart, ensuite tu vas à une agence juste avant l'entrée du beach pour acheter ton billet, puis après tu vas payer la redevance portuaire ( et les frais de fouille). Une fois que t'as ces documents, tu passes calmement, avec beaucoup plus de paix que tous ceux qui passent par des facilitateurs.
Arrivé à Brazza, ils vont t'arracher tes documents de voyager en sortant du bateau ( la première fois, j'en ai paniqué grave), puis te demander de payer un premier frais, puis un autre plus tard au bureau.
La bêtise de voyager avec un passeport, c'est qu'ils se disent que tu passes par là pour voyager en Europe, alors ils vont chercher à te soutirer des sous. Y a eu une fois où je leur en ai fait voir des couleurs…
Le retour à Kin a toujours été facile pour moi, il faut donner ses documents de voyager aux agents de la DGM, puis faire un joli sourire aux dames qui contrôlent et leur dire que tu as tout dépensé à Brazzaville, ça passe bien . lol
Un conseil, voyager très tôt le matin est recommandé, y a beaucoup moins de tracas.